La démographie, la crise et les retraites : le débat oublié
Maintenant que le débat sur les retraites est (provisoirement) apaisé, il est temps de pointer quelques éléments fondamentaux qui ont été quelque peu occultés par la focalisation sur le problème de la retraite à 60 ans.
De fait, le vrai débat n’a pas eu lieu.
Premier point : la démographie
Elle n’a pas changé brutalement en 2010 : elle est toujours aussi favorable (relativement). La France est le pays de l’UE où la démographie pose le moins de problèmes à long terme. A lui seul, notre pays représente 60% du croît naturel de tous les pays de l’UE à 28. D’autres pays (Allemagne, Italie, pays d’Europe centrale, Grèce) sont au contraire dans une situation démographique catastrophique et vieillissent beaucoup plus vite que le nôtre. En particulier, les « comparaisons » faites avec l’Allemagne sont totalement faussées.
On ne vous l’a pas dit ? C’est un oubli …
Le vrai problème est celui de l’emploi des séniors, dont le taux d’activité est un des plus faibles d’Europe : problème non résolu à ce jour, et par lequel on aurait dû commencer si l’on veut éviter que les plus de 60 ans deviennent chômeurs au lieu de retraités.
Deuxième point : la Crise
Selon les calculs du COR (Conseil d’orientation des retraites), le déficit prévisionnel des retraites en 2010 sera imputable aux deux tiers à la crise économique (plus de 20 milliards sur 32). Avant la crise, le déficit prévisionnel pour 2020 était de 25 milliards. Avec la crise, nous aurons en 2010 le déficit prévu pour 2030.
En d’autres termes : résoudre le problème des retraites, c’est d’abord lutter contre les effets –durables- de la Crise et réformer le système, comme promis il y a 2 ans.
On ne vous l’a pas dit ? C’est un oubli …
Troisième point la base taxable
Si l’on veut sauver le système de la répartition –un choix de société sur lequel les électeurs-contribuables pourraient être consultés, car il n’a rien d’obligatoire après tout – alors il faut alimenter ce système par une base taxable dynamique, et non par une base taxable en régression.
Or depuis 1982, la part des salaires dans la valeur ajoutée a baissé de 10 points, tandis que celle des profits distribués est passée de 3% en 1980 à 8% en 2007 (source : INSEE). La part des autres revenus du capital (comme les loyers par exemple, sans parler des plus-values) a augmenté tout aussi vite.
Conclusion
Comme le souligne le COR dans ses études, il n’y aura pas de solution durable sans élargir la base taxable – si l’on veut sauver le système, ce qui encore une fois n’a rien d’obligatoire. A moins bien sûr que l’on n’entreprenne les réformes fondamentales qui changeront cette répartition des revenus à l’origine de la Crise.
Aussi bien, une autre solution se dessine, avec l’accord envisagé entre la Caisse des Dépôts et Consignations et sa filiale, la Caisse nationale de Prévoyance, d’une part, et divers groupes privés (dont Malakoff Médéric) d’autre part, pour le développement de fonds de pension à la française. Mettez vos retraites en Bourse, c’est ce qu’il y a de plus sûr ! Depuis l’an 2000, l’indice CAC 40 n’a perdu que 45%. De fait, il devrait logiquement remonter dans le futur… et vous aurez peut-être une retraite, contrairement à ces 51 millions d’américains qui ont perdu la leur dans la crise de 2008-2009.
Puisqu’on vous le dit !